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Location meublée et parahôtellerie

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mardi, 14 août 2018 15:05

L'IFI et les entreprises individuelles de location meublée

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Dans cette note je propose d'expliquer quelles sont les conditions à respecter pour une entreprise individuelle de location meublée pour être exonérée d'IFI

L'exclusion de l'activité meublée des activités opérationnelles

L'article 965 du CGI prévoit expressément l'exonération d'IFI des immeubles des activités professionnelles des sociétés et notamment les activités commerciales.

Mais l'article 966 du CGI prévoit expressément que "n'est pas considérée comme une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale l'exercice par une société ou un organisme d'une activité de gestion de son propre patrimoine immobilier", alors même qu'elle relèverait des catégories fiscales des articles 34 et 35 du CGI qui définissent les activités relevant d'une catégorie professionnelle au sens de l'impôt sur le revenu, les bénéfices industriels et commerciaux (BIC).

La loi ne prévoit pas de définition précise de la notion d'activité de gestion de son propre patrimoine immobilier. Mais l'article 975 du CGI prévoit expressément deux cas des BIC où l'activité relève de cette catégorie

L'article 975 du CGI définit l'exonération des activités professionnelles principales :

"I. – Sont exonérés (…) lorsque ces biens ou droits immobiliers sont affectés à l'activité principale industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (…)
V. - Pour l'application du présent article, les activités commerciales s'entendent de celles définies à l'article 966.
Par exception au premier alinéa du présent V, est considérée comme une activité commerciale pour l'application des I à IV :

1° L'exercice d'une activité de location de locaux d'habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés [par une personne ou une société], (…)

Pour comprendre le régime de la location meublée, la loi invite ainsi le contribuable à une espèce de jeu de pistes.

C'est seulement en lisant l'article 975 que le contribuable peut comprendre que la location meublée est implicitement évoquée par l'article 966 comme étant une activité de gestion d'un patrimoine immobilier, exclue de l'exonération générale des activités opérationnelles mais prise en compte dans le champ d'application de l'exonération subsidiaire des activités professionnelles principales.

 

Dans quel cas une entreprise individuelle de location meublée est exonérée d'IFI ?

L'article 975 du CGI définit l'exonération des activités professionnelles principales et prévoit le cas de l'activité de location meublée individuelle :

"I. – Sont exonérés (…) lorsque ces biens ou droits immobiliers sont affectés à l'activité principale industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (…)
V. - Pour l'application du présent article, les activités commerciales s'entendent de celles définies à l'article 966.
Par exception au premier alinéa du présent V, est considérée comme une activité commerciale pour l'application des I à IV :
1° L'exercice d'une activité de location de locaux d'habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés [par une personne ou une société], (…) sous réserve, s'agissant des personnes (…), qu'elles réalisent plus de 23 000 € de recettes annuelles et retirent de cette activité plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal auquel elles appartiennent est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62."

Selon le texte légal, il faut remplir trois conditions pour être exonéré :

- exercer son activité professionnelle principale en tant que loueur en meublé,

- réaliser, au niveau du foyer fiscal, plus de 23 K€ de recettes,

- réaliser, au niveau du foyer fiscal, un revenu net supérieur aux autres revenus professionnels.

 

La condition relative à l'exercice professionnel principal est une selon moi une erreur de rédaction du législateur car c'est une nouvelle condition qui n'existait pas en matière d'ISF.

Or les textes initiaux et le rapport parlementaire de présentation de la réforme indiquait clairement que le régime de la location meublée n'était pas modifié par l'IFI, par rapport à l'ISF.

Cette condition de l'exercice professionnel principal est une condition du régime de droit commun des entreprises individuelles. Elle implique que l'exploitant individuel passe l'essentiel de son temps professionnel à l'exercice de l'activité. En pratique, cette condition est très gênante pour les loueurs en meublé qui sont de simples investisseurs et/ou qui ont une autre activité professionnelle principale, par exemple en tant que salarié.

 

Mais selon moi, même si ce point est discutable, la doctrine administrative publiée au BOFIP, a de facto supprimé l'obligation de respecter la condition de l'exercice d'une activité professionnelle principale.

En effet, cette doctrine (BOI-PAT-IFI-30-10-10-10 n° 50 et 60) indique :

"50
Aux termes du 1° du V de l'article 975 du CGI, l'activité de location de locaux d'habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés est, sous certaines conditions, considérée comme une activité commerciale susceptible d’ouvrir droit au régime d’exonération.
60
Lorsque cette activité est exercée par membre du foyer, il résulte de ces dispositions que les locaux d’habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés peuvent être considérés comme des actifs professionnels pour l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) aux conditions cumulatives suivantes :
- les membres du foyer fiscal réalisent plus de 23 000 € de recettes annuelles dans le cadre de cette activité ;
- les recettes annuelles s'entendent du montant réel des sommes perçues en vertu des contrats de location à titre de loyers, charges, taxes et remboursements de frais.
- les membres du foyer retirent de cette activité plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal est soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62 du CGI.
Il ressort notamment de ces dispositions que seuls les locaux effectivement loués, c’est-à-dire qui génèrent des revenus pour le foyer fiscal, sont susceptibles d’être éligibles au régime d'exonération des actifs professionnels.
Pour la détermination du seuil de 50 %, Il convient de retenir le bénéfice commercial net annuel dégagé par l'activité de location meublée.
Ce bénéfice correspond au bénéfice net déterminé dans les conditions prévues au 2 de l'article 38 du CGI. Il s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés.
Il doit être comparé avec le revenu net, c’est-à-dire après déduction des charges et abattements, du foyer fiscal dans les catégories d’imposition précitées, y compris le bénéfice tiré de la location."

A aucun moment la doctrine ne cite la condition de l'exercice de l'activité principale. Il y a donc lieu selon moi de considérer qu'elle n'a pas à être respectée pour obtenir l'exonération IFI.

Cette interprétation de la doctrine est renforcée par un autre extrait (BOI-PAT-IFI-30-10-10-10 n° 150):

"Les droits ou biens immobiliers affectés à l'exercice d'une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, ou salariée dans les cas visés au I-F-1 § 120 à 130, ne peuvent être considérés comme des actifs professionnels éligibles à l’exonération que si cette activité correspond à l'exercice d'une véritable profession.
Ce principe ne fait pas obstacle, sous certaines conditions à l'application de l'exonération des actifs professionnels utilisés par :
- certains loueurs en meublé (CGI, art. 975, V-1° ; cf. I-B-2-a § 50 à 60) ;"

 

Mais un autre extrait de la doctrine (BOI-PAT-IFI-30-10-10-30 n° 20) sème la confusion :

"A. La profession principale est celle qui constitue l'essentiel des activités économiques du redevable
20
Pour l'application de ce critère, il y a lieu de tenir compte de l'ensemble des activités professionnelles exercées par le redevable, y compris les professions salariées.
Au sein de cet ensemble, la profession qui, constituant l'essentiel des activités économiques du redevable, apparaît comme exercée à titre principal ne peut être déterminée que par un examen attentif de chaque cas particulier. À titre de faisceau d'indices, on s'attachera à des éléments comme le temps passé dans chaque activité, l'importance des responsabilités exercées et des difficultés rencontrées, la taille des diverses exploitations, etc.
Par ailleurs, lorsqu'un loueur en meublé professionnel exerce une activité salariée ou une autre profession à plein temps, l'activité de location ne peut pas en général être considérée comme la profession principale, même si elle procure des revenus supérieurs aux autres revenus de l'intéressé."

Faut-il interpréter ce texte comme indiquant implicitement que la condition d'activité principale est une condition imposée à l'activité de location meublée ?

Non, selon moi c'est même l'inverse.

En fait, ce texte porte sur la notion d'activité professionnelle principale en générale. En effet, cette condition doit être respectée pour l'exonération générale des activités professionnelle principale, à l'exception selon moi de l'activité de location meublée exercée à titre individuel.

Le texte évoque les critères qui permettent de considérer qu'une activité est principale et c'est dans ce cadre que la doctrine prévoit que le critère des revenus n'est pas décisif. Une personne peut très bien avoir une activité de location meublée qui lui procure des revenus professionnels les plus importants de son foyer sans pour autant que cette activité de location meublée soit nécessairement considérée comme principale. C'est assez logique car l'activité de location meublée est souvent passive.

Autrement dit, ce que dit cette doctrine, c'est que si vous exercez une activité de plombier à temps plein, il s'agit bien de votre activité professionnelle principale, alors même que vous exercez une activité de location meublée, qui vous procure l'essentiel de vos revenus professionnels, mais qui ne vous occupe pas beaucoup.

Le texte ne porte pas sur l'activité de location meublée mais sur les autres activités professionnelles et sur les indices à retenir pour définir une activité professionnelle comme étant principale.

En fait, selon moi, il est tout à fait possible de cumuler une exonération IFI d'une activité individuelle de location meublée et une exonération IFI d'une autre activité professionnelle principale puisque, pour l'activité de location meublée, la condition d'activité principale n'existe pas.

Mais pour que ce cumul d'exonération soit possible encore faut-il que l'activité de location meublée ne soit pas principale au sens des différents indices qui définissent cette notion, notamment le temps passé.

Ce qui va dans le sens de mon interprétation de cette doctrine administrative sur l'IFI, c'est qu'il s'agit en fait d'une reprise, presque mot pour mot, d'une précision qui figurait déjà dans la doctrine administrative en matière d'ISF (D. adm. 7 S-3313 n° 2, 1-10-1999 ; BOI-PAT-ISF-30-30-10-30 n° 20, 12-9-2012).

Or en matière d'ISF, il n'y avait pas, de façon certaine, une quelconque obligation légale d'activité principale pour les entreprises individuelles de location meublée.

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2 Commentaires

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul vendredi, 14 septembre 2018 11:32 Posté par Duvaux Paul

    C'est sans portée. C'est l'erreur de plume.

  • Lien vers le commentaire LAMBARD ALAIN vendredi, 14 septembre 2018 08:03 Posté par LAMBARD ALAIN

    Au N° 60 du BOI-PAT-IFI-30-10-10-10 l’administration rappelle, pour les termes de comparaison de la deuxième condition relative à l’exonération des biens utilisés dans le cadre de la LMP que le bénéfice est définit à l’article 38-2 et précise:
    « Il s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés« . Dans la précipitation rédactionnelle (6 mois) l’adminstration fait une erreur: cette définition ne correspond pas à celle du bénéfice, mais à celle des capitaux propres...
    La définition de l’article 38-2 est la suivante:
    « Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ».
    Qu’en pensez-vous?

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