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Gestion fiscale du patrimoine privé

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mercredi, 25 février 2015 08:27

Le contrôle fiscal en matière d'ISF

En matière d'ISF, les conflits avec l'administration portent le plus souvent sur des questions d'évaluation, même si d'autres sujets peuvent donner lieu à discussion, comme l'exonération au titre des biens professionnels.

 

1 Généralités sur les rappels

Le premier réflexe d'un contribuable qui fait l'objet d'une démarche quelconque des services fiscaux doit être de contacter un avocat spécialisé en droit fiscal.

En effet, n'importe quel contribuable, même le plus honnête, n'est pas à l'abri d'un rappel, même le plus contestable.

L'administration fiscale n'hésite pas à procéder à des rappels inéquitables ou discutables. Le coût d'un rappel peut être très élevé, compte tenu des règles de prescription et de l'application possible des pénalités.

Toutefois, la procédure fiscale, offre de nombreux moyens de se défendre et de réduire sensiblement la "note".

Encore faut-il savoir utiliser ces moyens à bon escient et au bon moment.

En général, le meilleur moment, c'est le tout début, d'où la nécessité impérative de contacter très vite un avocat spécialisé en droit fiscal, dès le premier courrier des services fiscaux.

En matière d'ISF, les contrôles et les rappels sont le plus souvent opérés par des inspecteurs spécialisés en fiscalité immobilière.

C'est globalement une bonne chose, car cela réduit les risques d'être confrontés à des rappels non conformes à la loi, relativement courants dans d'autres domaines de la fiscalité. De plus, les inspecteurs spécialisés en fiscalité immobilière ont une approche généralement ouverte à la recherche d'un compromis.

Les discussions en matière d'ISF, et spécialement en matière d'évaluation, placent l'administration en situation difficile, compte tenu notamment des contraintes procédurales (charge de la preuve, recours hiérarchiques, saisine de la commission, droit à l'expertise judiciaire en cas de contentieux) et de l'obligation de trouver des éléments de comparaison similaires.

En pratique, les litiges en matière d'évaluation se concluent le plus souvent par un accord négocié où l'administration admet une valorisation raisonnable. Les contribuables ont rarement intérêt à engager des procédures contentieuses.

 

2 La procédure écrite contradictoire

Lorsque l'administration souhaite contester la valeur déclarée par le contribuable, elle doit engager une procédure de redressement contradictoire.

Il s'agit d'une procédure écrite préalable où l'administration doit informer le contribuable sur le motif du rappel envisagé dans un premier courrier appelé, proposition de rectification (sur un formulaire numéroté 3924).

Le contribuable peut contester le rappel dans des observations écrites transmises impérativement dans le délai de 30 jours après réception de la réponse de la proposition de rectification.

L'administration est tenue de répondre à ces observations par un courrier motivé (la "réponse aux observations du contribuable", sur un formulaire numéroté 3926).

Ces premiers échanges écrits sont très importants. Le contribuable doit rédiger ses observations avec beaucoup de soins de façon à obliger l'administration à prendre en compte ses arguments. Très souvent, si les observations sont bien motivées, l'administration réduit sensiblement ses prétentions.

Notons, que si, à chaque étape de la procédure, le contribuable doit respecter impérativement un délai de 30 jours, aucun délai n'est imposé aux services fiscaux pour répondre.

Le seul délai est celui de la prescription de la mise en recouvrement soit le 31 décembre de la troisième année suivant la proposition de rectification. Le plus souvent heureusement, l'administration répond dans un délai raisonnable.

 

3 La commission départementale de conciliation

Si le désaccord persiste, et s'il porte sur une question d'évaluation, la commission départementale de conciliation peut être saisie à l'initiative de l'une ou l'autre des parties en vue d'émettre un avis sur la valeur vénale réelle des biens en litige.

L'avis de la Commission ne lie pas les parties, l'administration comme le contribuable peuvent très bien passer outre et maintenir leur position. En pratique, cet avis est souvent déterminant, et, sauf cas particulier, l'administration et le contribuable s'y rallient.

En pratique, la commission est saisie le plus souvent par le contribuable : il doit impérativement demander sa saisine dans le délai de 30 jours après la réception de la réponse aux observations du contribuable.

La commission est présidée par un magistrat de l'ordre judiciaire et elle comprend huit autres membres, quatre représentants de l'administration, un notaire et trois représentants du contribuable.

L'intérêt de saisir la commission est d'avoir, assez rapidement, une forme d'avant jugement sur le dossier. Si le contribuable fait valoir des arguments sérieux, il peut obtenir assez facilement une décision en sa faveur. La commission a une tendance naturelle à faire la part des choses et à proposer une solution de compromis.

La procédure devant la commission est informelle, essentiellement orale. Chaque partie expose ses arguments, doit répondre aux questions des membres de la commission, et peut interpeller l'autre partie. Il faut convaincre en peu de temps en produisant quelques documents illustrant sa position et contredisant les arguments de l'adversaire.

 

4 Les spécificités en matière de preuve en cas de conflit sur l'évaluation

Il existe des spécificités en matière de contestation relative à l'évaluation des biens.

Ainsi, l'administration est tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations par rapport à la valeur vénale réelle du bien concerné (LPF art. L 17, al. 2).

Pour apporter cette preuve, l'administration doit procéder à une évaluation des biens étayée par des justifications crédibles.

En pratique, les services fiscaux ont souvent des difficultés à démontrer la validité de leur estimation.

Le principe est en effet que l'administration doit utiliser la méthode par comparaison.

En particulier, pour les immeubles, l'administration est tenue de faire valoir des mutations immobilières intervenues avant le fait générateur de l'impôt et portant sur des biens intrinsèquement similaires.

L'administration doit indiquer les références des éléments chiffrés et les termes de comparaison qui justifient les rehaussements.

Pour contester le rappel, le contribuable peut :

- mettre en cause le caractère intrinsèquement comparable des éléments produits par les services fiscaux en mettant en évidence des différences significatives,

- faire valoir des spécificités de l'immeuble qui, sans remettre en cause le caractère comparable des références produites par les services fiscaux, justifient l'application d'une décote,

- produire ses propres éléments de comparaison qui justifient son évaluation initiale ou en tout cas d'une évaluation inférieure à celle des services fiscaux.

Pour trouver ses propres éléments de comparaison, le contribuable peut utiliser la base de donnée "PATRIM". Cette base de donnée est accessible à tous les contribuables par l'intermédiaire de son espace personnel sur impot.gouv. Elle permet d'avoir accès à presque toutes les ventes de bien intervenues. Il faut délimiter un espace géographique et choisir un type de bien. En pratique, il est fréquent que les services fiscaux retiennent les éléments de comparaison qui les arrangent et excluent ceux qui les gênent. C'est donc au contribuable de publier la liste de tous les éléments comparables et de faire valoir les éventuelles omissions des services fiscaux.

Mais la technique la plus efficace est de faire valoir, preuve à l'appui, les spécificités de son bien qui justifient une décote spéciale.

En effet, les éléments de comparaison produits par les services fiscaux sont généralement des biens "normaux", présumés en état correct. Or toute maison a toujours ses faiblesses (fissure, infiltration, environnement bruyant,...) et il est facile pour le contribuable de les mettre en avant, en omettant d'évoquer ses atouts. De son coté, l'administration ne peut pas mettre en avant les éventuelles faiblesses des éléments de comparaison qu'elle cite car elle ne connaît que leurs caractéristiques générales (dimension et adresse).

 

5 La procédure contentieuse

Si les rappels sont maintenus, le contribuable peut les contester en engageant une procédure contentieuse.

La procédure commence par une réclamation.

En cas de rejet (ce qui est le plus fréquent), le contribuable doit soumettre le litige au Tribunal de Grande Instance. Les décisions peuvent donner lieu à un appel devant la Cour d'appel. Enfin, il est possible de contester une décision d'appel devant la Cour de cassation, s'il est considéré que la cour d'appel n'a pas fait une bonne application du droit.

En cas de litige sur la valeur d'un bien, les contribuables sont en droit de demander l'intervention d'un expert dont l'avis sera souvent décisif.

Il ne faut pas hésiter à engager une procédure contentieuse quand on dispose de bons arguments. Les juges n'hésitent pas à donner raison au contribuable contre l'administration. Cela étant, en pratique, il est très rare de faire du contentieux dans les litiges en matière ISF, en tout cas quand ce litige porte sur une question d'évaluation car il est relativement facile de trouver un compromis en négociant avec les services fiscaux.

 

6 A quoi sert un avocat fiscaliste ?

Dès le début de la procédure, il faut consulter un avocat fiscaliste.

Un avocat fiscaliste est habitué à ce type de procédure. Il sait quels arguements doivent être avancés. Il sait comment utiliser la base PATRIM. Il sait rechercher et faire valoir les spécificités du bien qui justifient une décote.

Il est habitué à négocier des compromis avec les services fiscaux et il sait à quel niveau un compromis raisonnable est possible.

4 Commentaires

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul samedi, 22 septembre 2018 07:43 Posté par Duvaux Paul

    Une réponse sérieuse supposerait de connaître votre dossier. Les services fiscaux doivent produire des éléments de comparaison sérieux datant de quelques années. Je ne pense pas anormal d'utiliser une vente de 2010 pour justifier d'une valeur en 2011 et 2012, et même 2013. Mais tout dépend du contexte et notamment de l'existence de vente de biens similaires. A l'impossible nul n'est tenu.

  • Lien vers le commentaire BIDOU Olivier vendredi, 21 septembre 2018 21:08 Posté par BIDOU Olivier

    Le fisc présente des comparaisons datant de 2 ans avant l'année redressée et les présentent 2 fois.
    Exemple: pour l'année ISF 2012, le fisc compare des biens immobiliers de l' année 2010. Le même bien sert de bien de comparaison pour l'ISF 2013. Le fisc prêtant ne ne pas avoir d'autres biens intrinsèquement comparable. Est légal ?
    Merci de votre réponse rapide.

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul lundi, 30 octobre 2017 10:17 Posté par Duvaux Paul

    Une réponse sérieuse supposerait de connaître votre dossier. Le fisc n'est pas obligé de vous communiquer les pièces qu'il n'invoque pas. Tant que la loi ne fixe pas de délai impératif, le fisc fait ce qu'il veut. Quand l'administration prend trop son temps, cela peut certes causer une gêne sensible pour le contribuable, mais ce n'est pas un vice de procédure.

  • Lien vers le commentaire LORTIE Jean-François samedi, 28 octobre 2017 09:24 Posté par LORTIE Jean-François

    Deux questions pour une litige d'ISF sur un bien situé à MONACO.

    Le fisc français peut-il refuser de me donner une copie de TOUS ses échanges avec les services fiscaux monégasques ?

    Le fisc français a attendu plus d'une année pour me faire une proposition de redressement (avec pénalité) me privant du droit de me justifier avant; le fisc français a-t-il le droit de différer un redressement, privant ainsi le contribuable de son droit de réponse dans les temps

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