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Fiscalité du dirigeant d'entreprise

Démêlez les noeuds de la fiscalité
mercredi, 25 octobre 2017 13:13

Le nouveau régime des plus-values sur titres, les zombies c'est nous

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Le régime des plus-values sur titres va encore changer totalement. C'est habituel, comme dans toutes les séries télés, les nouvelles saisons donnent toujours lieu à des bouleversements.

 

En fiscalité, les nouvelles saisons, c'est le changement de président.

L'ancien régime de M. Hollande était à peine stabilisé. Je commençais à peine à le comprendre et à l'expliquer à mes clients. Mais M. Macron est arrivé avec sa flat tax.

En principe, c'est plus simple avec l'application d'une flat tax à 30 %.

Mais, en fait non. C'est encore plus compliqué.

En principe la flat tax, c'est un cadeau aux riches.

Mais en fait non, pas nécessairement.

Le problème c'est que le nouveau régime mélange les restes de l'ancien régime avec le nouveau régime. Les deux régimes vont encore coexister pendant plusieurs années.

La flat tax

La flat tax c'est l'imposition des dividendes et des plus-values sur titre au taux global de 30 %, applicable à compter des revenus de 2018.

Ce taux de 30 % inclut l'impôt sur le revenu au taux de 12,8 % et les prélèvements sociaux au taux de 17,2 %.

Ce taux de 12,8 % apparaît comme incroyablement favorable.

Il faut en effet le comparer au taux du barème de l'impôt sur le revenu : 14, 30, 41 ou 45 %.

Le taux de 12,8 % est inférieur au premier taux du barème, soit 14 %.

Ce serait un énorme cadeau aux riches.

En fait non.

La flat tax n'est pas (toujours) un cadeau aux riches.

Mais la réforme Macron permet aux contribuables de choisir entre la nouvelle flat tax et le régime du barème et des abattements.

 

Pour l'imposition des dividendes, la flat tax sera généralement plus intéressante.

Rappelons que, barème ou flat tax, les prélèvements sociaux à 17,2 % en 2018 s'appliquent de la même façon puisque les abattements ne s'appliquent pas aux prélèvements sociaux. Il faut donc uniquement s'intéresser à l'impôt sur le revenu.

Or, le taux d'impôt sur le revenu de la flat tax, soit 12,8 % (30 - 17,2), est plus intéressant que l'application combinée de l'abattement des dividendes de 40 % et des taux du barème de 30 %, 41 % et 45 %, soit des taux globaux , d'environ, 16 %, 22 % et 24 %.

Autrement dit, pour presque tous les contribuables ayant des revenus significatifs, la flat tax fait gagner des sous par rapport à l'application du barème avec abattement de 40 %.

D'ailleurs, la flat tax aboutit à revoir le choix entre rémunération du gérant et distribution de dividendes et il devient souvent plus intéressant de préférer les dividendes à la rémunération du gérant majoritaire de SARL pour les dirigeants de PME. Du coup le schéma avec SAS, président peu payé et gros dividendes va sans doute revenir à la mode.

 

Mais pour l'imposition des plus-values sur titres, le choix de la flat tax est beaucoup moins évident.

En effet, si François Hollande, l'ennemi de la finance, avait prévu de soumettre les plus-values sur titre au régime du barème, ce qui aboutissait à une imposition excessive, il avait ensuite fait machine arrière en réduisant très significativement cette imposition en permettant aux contribuables de bénéficier d'importants abattements sous réserve d'une certaine durée de détention. L'abattement maximum va de 65 % à jusqu'à 85 % dans certains cas, si les titres sont détenus plus de 8 ans.

Au bout du compte, les plus-values relevant de la combinaison de l'abattement et du barème se sont retrouvées faiblement taxées, et même moins taxées que sous Sarkozy. Autrement dit, l'ennemi de la finance s'est révélé un bon ami.

Et Macron et sa flat tax ?

La flat tax ce n'est pas vraiment un cadeau aux riches pour l'imposition des plus-values sur titres, car la taxation avec la flat tax sera généralement supérieure au barème après abattement de Hollande.

En effet, si vous bénéficiez d'un abattement de 65 %, le taux réel reste toujours inférieur à 12,8 % (sauf si vous n'êtes pas imposable malgré votre plus-value mais il faut imaginer une petite plus-value et/ou beaucoup d'enfants).

Vous n'avez aucun intérêt à rester en flat tax si vous détenez les titres depuis au moins 8 ans.

Mais Macron a bien fait les choses (si le texte est confirmé) car, pour les titres acquis avant 2018, il sera possible d'opter pour l'application du barème pour écarter la flat tax et bénéficier des régimes d'abattement de Hollande.

Ainsi, pour l'essentiel, la réforme des plus-values de 2018 préserve les droits des anciens actionnaires qui conservent (presque) toutes les règles applicables avant la réforme.

Mais pour les capitalistes postérieurs à 2018, il n'y aura plus d'abattement et ils ne leur restera plus que la flat tax.

En effet, pour les titres acquis à partir de 2018, les abattements Hollande applicables aux plus-values sont supprimés. Mais bien sûr l'abattement de 40 % pour les dividendes reste applicable.

 

Le choix entre le barème ou la flat tax est un choix annuel global

Attention au fait que le choix à faire entre la flat tax ou le barème est un choix annuel global. Donc si vous avez des dividendes, vous serez tenter d'opter pour la flat tax alors que si vous avez de grosses plus-values vous aurez intérêt à choisir le système ancien du barème et des abattements. 

Sauf que vous ne pourrez pas faire votre marché : ce sera le même régime pour les deux types de revenus. Il y aura donc un choix délicat à faire en fin d'année et des calculs subtils à opérer.

 

Ne pas oublier l'année blanche dans son raisonnement

Attention au fait qu'avec l'année blanche, en principe en 2018, les rémunérations des dirigeants ne dépassant pas celles déjà perçues au titre des trois dernières années seront exonérées d'impôt alors que les dividendes et les plus-values seront nécessairement taxés.

 

Vendez avant la fin de l'année si vous partez en retraite

Pour les personnes qui prennent leur retraite et qui vendent leurs titres dans le délai de 2 ans, il faut noter que le régime Macron (500 K€ d'abattement) est moins favorable que le régime Hollande encore applicable jusqu'à la fin de l'année 2017 (500 K€ d'abattement et en plus abattement de 85 %). Donc si vous faites une grosse plus-value en vendant vos titres, faites votre vente si possible avant la fin de l'année.

 

Mes pronostics pour la prochaine saison

La nouvelle saison fiscale commence à peine et il est donc sûrement présompteux de faire de la politique fiscale fiction. Mais les fans sont nombreux, donc je vais proposer mes prévisions pour l'avenir. Je vois bien la suppression tôt ou tard de l'abattement de 40 % sur les dividendes, la supression des régimes d'abattements Hollande sur les plus-values, donc la généralisation de la flat tax, éventuellement son application aux plus-values immobilières, la fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu, puis une augmentation de l'impôt sur le revenu pour financer la baisse des cotisations sociales, et donc une augmentation de la flat tax.

 

Conclusion

En conclusion, les choix à faire risquent d'être compliqués dans les prochaines années.

En résumé, pour vos dividendes choisissez la flat tax, pour vos plus-values sur des titres anciens, choisissez plutôt le barème. Si vous faites des plus-values sur des titres anciens, essayez d'éviter de recevoir des dividendes car le choix pour le barème est nécessairement global.

La fiscalité est une mystérieuse maladie qui nous transforme en morts vivants, car nous n'y comprenons rien tellement c'est compliqué.

Les contribuables avancent dans la nuit, l'air hagard, le cerveau déconnecté, comme dans la série The Walking Dead.

Quelques avocats fiscalistes et certains énarques de Bercy s'imaginent avoir tout compris et pensent échapper au virus, mais c'est une illusion.

Les zombies c'est nous.

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