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Vous ne serez peut-être pas d'accord
mercredi, 30 août 2017 07:59

M. MACRON nominé au prix CAHUZAC

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Le gouvernement propose de supprimer l'ISF et le remplacer par l'IFI, l'impôt sur la fortune immobilière.

L'idée c'est que l'ISF serait supprimé pour tout, sauf pour le patrimoine immobilier. Mais sinon les mêmes règles générales resteraient les mêmes.

L'immobilier professionnel resterait exonéré.

De même, les détenteurs d'un patrimoine immobilier pourraient toujours déduire l'emprunt souscrit pour acquérir les immeubles.

L'idée paraît de bon sens, et c'est une ânerie technique (qui mérite au moins une nomination au prix Cahuzac attribué chaque année à la pire idée fiscale).

Je m'explique :

Dans le cadre d'un impôt qui frappe la globalité de la fortune, il est parfaitement cohérent de prendre en compte les dettes et de les déduire de la base.

Mais si l'impôt ne vise qu'une partie de la fortune, il devient incohérent de déduire le passif relatif aux seuls actifs restant.

Pourquoi ? Parce que les contribuables, eux, ne sont pas passifs (c'est le cas de le dire).

Les contribuables s'adaptent à l'impôt en vue de le réduire au maximum. Les politiciens et les économistes, apprentis fiscalistes, oublient souvent ce point dans leurs raisonnements fiscaux.

Donc que feront les contribuables face à l'IFI sachant que leurs placements mobiliers sont exonérés, que leurs immeubles sont taxés, mais avec le droit d'imputer le passif relatif à l'immobilier ?

Ils achèteront systématiquement leurs biens immobiliers avec des prêts in fine. Autrement dit, ils se débrouilleront pour ne jamais avoir un actif net immobilier positif.

C'est ce que font déjà les contribuables étrangers qui veulent échapper à l'ISF quand ils achètent des immeubles français car les étrangers ne sont imposables à l'ISF qu'à hauteur de leur bien français.

Ce type de stratégie ne servait à rien dans le cadre de l'ISF classique pour les contribuables résidents fiscaux français car si vous vous endettez pour acheter vos actifs immobiliers, vous devez bien mettre votre richesse ailleurs, et ailleurs, dans l'ISF actuel, elle est taxée.

Prenons un exemple.

Vous êtes M. RICHE, vous avez un patrimoine de 10 M€ dont 5 M€ de placements en bourse et 5 M€ de patrimoine immobilier constitué par une (très) belle villa au Touquet. Imaginez que vous vendez cette belle villa, pour un prix de 5 M€, et que vous placez cette somme à la bourse, et ensuite vous rachetez une autre villa à côté au même prix, en vous endettant.

A la fin de l'opération, vous avez 10 M€ de placements boursiers, une nouvelle villa de 5 M€ et une dette de 5 M€. Votre patrimoine net n'a pas bougé, vous êtes toujours riche à hauteur de 10 M€.

Avec l'ISF actuel, aucun gain.

Avec l'IFI, l'ISF nouveau façon MACRON, vous n'avez plus de patrimoine taxable puisque votre patrimoine immobilier net c'est zéro. Vous gagnez 5 M€ de base taxable en moins.

Vous me direz que c'est un schéma compliqué à mettre en place et un peu artificiel.

C'est vrai mais c'est très rentable quand votre impôt annuel est égal à 1,5 % de votre patrimoine. 

Donc tous les riches vont le faire, surtout les très riches car ce sont surtout les gens très riches qui peuvent se permettre de faire ce type de schéma.

Et les conseils fiscaux vont se débrouiller pour établir le schéma de telle sorte qu'il ne soit pas attaquable juridiquement : du genre, j'ai changé de villa car l'ancienne n'était plus à mon goût et j'en ai profité pour réorganiser mon patrimoine car je souhaite faire plus de placements boursiers. Et oups ! hasard, cela me permet aussi de payer moins d'impôt.

La solution consisterait à taxer les patrimoines immobiliers sans tenir compte de l'endettement. Cette solution est un peu injuste par rapport à ceux qui sont endettés de façon naturelle c'est mais la seule façon de faire correcte au plan technique.

Ce type d'impôt sur le patrimoine immobilier brut existe déjà, c'est la taxe foncière.

Donc si M. MACRON n'était pas un énarque qui sait déjà tout sur tout et qui écrit son programme politique sur un coin de table après un bon déjeuner, il aurait proposé d'augmenter la taxe foncière en échange de la suppression de l'ISF.

Selon moi, la bonne réforme de l'ISF serait plutôt de faire un impôt avec un taux beaucoup plus faible, genre 0,1 %, avec une franchise mais sans exonération aucune et sans plafonnement. Les riches seraient taxés, mais de façon égale et raisonnable. L'ISF actuel est spoliateur à cause de son taux, et injuste à cause de l'exonération et du plafonnement.

Et par ailleurs, il faudrait que la taxe foncière soit établie sur la valeur réelle des biens et non sur une évaluation forfaitaire obsolète vielle de près de 50 ans, comme c'est le cas actuellement. C'est un autre sujet, mais très révélateur des malversations fiscales de nos politiciens. 

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2 Commentaires

  • Lien vers le commentaire Duvaux Paul jeudi, 28 septembre 2017 07:26 Posté par Duvaux Paul

    Je suis plutôt d'accord avec vos remarques. Mais sur les défauts de l'ISF, il faut les relativiser. Tous les impôts ont des défauts. Taxer la fortune sur une base annuelle me paraît globalement une bonne idée à condition que l'impôt reste modeste et supportable. D'où mon idée de limiter le taux à 0,1 %, mais en contrepartie à exclure toute exonération. L'exonération des biens professionnels n'a plus de sens si l'impôt est faible.

    Selon moi, le bon impôt, c'est l'impôt simple, neutre et non spoliateur.

  • Lien vers le commentaire Arie BOLESLAWSKI mercredi, 27 septembre 2017 22:42 Posté par Arie BOLESLAWSKI

    Je suis d'accord avec vous. La prise en compte du passif déductible est un point essentiel à préciser. Cela dit comme vous le dites bien, c'était déjà un souci sur la taxation des contribuables non résidents (et notamment les français vivant à l'étranger qui sont en proportion plus assujettis à l'ISF que les résidents) et les gouvernements successifs n'ont jamais corrigé ce point.
    Pour autant il y a une chose que vous oubliez dans votre raisonnement et qui empêche d'optimiser comme vous en faites la démonstration. C'est les droits de mutation. En effet vendre puis acheter la villa dont vous parlez va coûter pas loin de 8% (je ne parle même pas des frais d'agence, de déméngement, etc...). Vous allez me dire que pour les plus riches, imposables au taux de 1.5%, cela est rentable sur le long terme mais il faut avoir confiance dans la pérénnité de la reforme et notamment au delà du quinquennat actuel. Or l'expérience passée a montré qu'une des premières choses qu'un gouvernement de gauche fait en arrivant au pouvoir est de rétablir l'ISF (cf. Hollande en 2012 rétablissant l'ancien barème dès le 15 juin 2012).
    Mon avis est que l'ISF actuel est un mauvais impôt à plus d'un titre. Il fait fuir les capitaux vers nos voisins qui n'ont pas d'équivalents, il est injuste dans son recouvrement car les biens récemment acquis sont valorisés à leur valeur d'achat ce qui est loin d'être le cas des biens hérités. Sur le fond, il taxe un patrimoine déjà acquis et taxé et il le taxe lourdement compte tenu du niveau des taux actuels. La bonne solution est donc de le supprimer. Et comme il faut bien récupérer l'argent, je trouve que l'idée de taxer l'immobilier au niveau fédéral c'est-à-dire de l'Etat (et non au niveau local uniquement comme la taxe foncière) est certainement une bonne chose. Car c'est un impôt à assiette large, auquel on ne peut échapper qu'en vendant et l'impôt passe alors à l'acquéreur. Au pire, cela a un impact négatif sur l'immobilier ce qui est aussi une bonne manière de redistribuer la richesse des riches vers les pauvres et des générations agées vers les jeunes. Il n'y a qu'à voir les commerces de proximité péricliter pour comprendre que l'immobilier élevé est un fléau pour l'économie. Enfin, sur le fond, taxer l'immobilier, c'est comme faire payer à chacun le droit de posséder un bout de la France. Cela parait totalement naturel quand on vit dans un pays qui vous offre ses services.
    Et pour en revenir à la question de la déduction du passif, je pense comme vous que la seule solution technique est de l'exclure. Si on veut minimiser l'impact sur les nouveaux acquéreurs à crédit on peut accepter de le déduire jusqu'à un plafond assez bas. Cela reste assez juste car on achète rarement de l'immobilier à plusieurs millions quand on n'en n'a pas les moyens.

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