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dimanche, 29 janvier 2012 11:40

La contribution sur les hauts revenus

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L'Etat vient de créer un troisième impôt sur le revenu.

Il y avait déjà l'impôt sur le revenu proprement dit que tout le monde connaît même si seulement la moitié des français le paie.

Il y avait déjà aussi la CSG et ses amis (CRDS et prélèvements sociaux), un monstre hybride, mi impôt, mi cotisation sociale.

Certains évoquent le projet de faire la fusion de la CSG et de l'impôt sur le revenu. L'idée semble bonne mais il faudrait surtout selon moi limiter le rôle des cotisations sociales au financement de l'assurance (et réduire son niveau obligatoire) et réserver à l'impôt le financement de la solidarité (politique familiale, minima sociaux).

Il faudrait aussi réformer l'impôt sur le revenu pour le simplifier et réduire son mitage, autrement dit toutes les exonérations et déductions qui le rendent injuste et peu rentable.

Mais les politiciens, peu courageux, préfèrent contourner la difficulté en créant de nouveaux impôts, leur sport favori. C'est déjà ce qui s'est passé avec la CSG.

C'est encore le même scénario avec la création de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus.

Il s'agit bien d'un nouvel impôt sur le revenu, le troisième donc. Bravo les gars !

Bien sûr cette contribution est assortie de l'effet rétroactif habituel des lois de finances : les revenus de 2011 sont visés.

La contribution est calculée au niveau du foyer fiscal. Sa territorialité est la même que celle de l'impôt sur le revenu. Il s'agit d'un impôt progressif avec trois tranches. Une première tranche est à taux zéro, jusqu'à 250 000 € pour les célibataires et 500 000 € pour les couples. Le taux est ensuite de 3 % entre 250 000 € et 500 000 € pour les célibataires et entre 500 000 € et 1 M€ pour les couples. Ensuite le taux est de 4 %. Ce système aboutit à créer un régime de quotient familial limité au couple.

Comme la CSG, son assiette est plus large que celle de l'impôt sur le revenu. Cette assiette élargie vient de facto limiter l'intérêt de certaines exonérations d'impôt sur le revenu, car certains revenus exonérés de l'impôt sur le revenu sont assujettis à cette nouvelle contribution.

La base de l'impôt est ce qui est appelé le "revenu fiscal de référence", un concept déjà utilisé pour l'octroi de certains avantages fiscaux et sociaux notamment en matière d'impôts locaux.

Il s'agit donc d'une base élargie par rapport à l'impôt sur le revenu. Mais, pour des raisons obscures, l'élargissement n'est pas total, certains revenus restent exonérés de cette nouvelle contribution.

Il faut prendre les revenus assujettis à l'impôt sur le revenu et rajouter certains revenus exonérés d'impôt sur le revenu. Par exemple, il faut rajouter les revenus soumis au prélèvement libératoire, les revenus des heures supplémentaires, les revenus des impatriés, des expatriés, certains revenus professionnels exonérés lorsqu'ils sont réalisés dans certaines zones franches, les plus-values sur les cessions au sein du groupe familial.

Les plus-values immobilières exonérées d'impôt sur le revenu sont aussi exonérées de cette nouvelle contribution.

Mais il faut rajouter les plus-values réalisées à l'occasion du départ à la retraite du dirigeant qui peuvent être exonérées d'impôt sur le revenu en application du régime de l'abattement pour durée de détention.

Les dirigeants des sociétés de capitaux qui ont vendu leur société au moment du départ à la retraite bénéficient sous certaines conditions d'un abattement d'un tiers par année de détention au-delà de la sixième et donc d'une exonération après 8 ans de détention. Cette plus-value était déjà assujettie à la CSG et prélèvements sociaux (actuellement 13,5 %). Elle sera donc assujettie en plus à ce nouveau prélèvement.

En revanche, les chefs d'entreprise individuelle qui bénéficient du régime jumeau en cas de départ à la retraite ne sont pas visés par la nouvelle taxe.

Pour cette nouvelle contribution, il est créé un système spécifique de lissage pour éviter l'application d'un taux trop élevé aux revenus exceptionnels, un peu comme le système du quotient qui s'applique à l'impôt sur le revenu.

Le calcul du lissage est le suivant. Il faut d'abord calculer la moyenne des revenus fiscaux de référence des deux années précédentes. Ensuite, il faut faire la différence entrer le revenu fiscal de référence de l'année et cette moyenne. Cette différence est divisée par deux. Cela donne ce que je propose d'appeler le supplément. La contribution est calculée ensuite sur la base de la moyenne majorée du supplément.

La contribution est calculée sur cette base puis le résultat est multiplié par deux pour avoir la contribution finale.

C'est enfantin pour un polytechnicien énarque mais, pour vous et moi, cela fait encore un calcul fiscal compliqué.

Prenons l'exemple d'un dirigeant de société qui est marié et qui dispose tous les ans d'un revenu annuel de 100 000 €. Il vend son entreprise en 2011 et fait une plus-value de 2 M d'€ (et toujours 100 000 de revenu normal en plus).

La moyenne des revenus fiscaux de référence est de 100 000 €.

La différence entre le revenu de l'année 2011 et cette moyenne donne 2 000 000 €.

La différence divisée par deux donne 1 000 000 €.

En ajoutant ce supplément à la moyenne, cela donne 1 100 000 €.

L'application du barème donne [(1 000 000 -500 000) x 3%] + 100 000 x 4 %, soit 19 000 €, ce qui fait donc 38 000 € de contributions.

Sans l'application du mécanisme de lissage, la contribution serait de 59 000 €.

La contribution est dite "exceptionnelle", au sens où elle est sensée ne durer que quelques années. Elle sera supprimée, dit le texte de loi, quand l'Etat aura réussi à équilibrer son budget. Quand les poules auront des dents ?

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