La démocratie est certes basée sur le débat, mais surtout sur la construction des opinions.
Le bon débat démocratique n'est pas un débat de type cacophonie où chacun donne son avis sans tenir compte de l'avis des autres. Il ne s'agit pas non plus du canapé du psychanalyste où chacune pourrait vider son sac pour aller mieux après.
La démocratie c'est l'exercice du pouvoir par le peuple. Cet exercice du pouvoir suppose que le peuple puisse prendre position et décider des orientations sur les sujets les plus importants de la vie sociale.
Le débat démocratique doit être utile à cet objectif.
Le débat démocratique vise donc à faciliter l'émergence des opinions majoritaires et éclairées.
La démocratie n'est pas un régime politique où l'opinion majoritaire se déduirait seulement des sondages ni même des votes.
Pour prétendre diriger un pays sur la base des opinions majoritaires du peuple, encore faut-il que ces opinions existent et qu'elles soient de qualité.
Une opinion de qualité n'existe que si celui qui l'émet y a réfléchi longuement. Cela suppose de prendre en compte les opinions contraires. Cela suppose de faire la part des choses et notamment des contraintes techniques.
Pour prendre position sur n'importe quel sujet, il faut un minimum d'expertise.
Comme ce sont les citoyens qui doivent prendre des décisions sur les points importants du fonctionnement de la société, encore faut-il que ces citoyens soient informés un minimum sur les sujets importants et qu'ils puissent se faire leur opinion et voter en conséquence.
Un débat de qualité doit être organisé et structuré.
Il est absurde de croire que tous les citoyens ont le temps et la motivation pour s'intéresser à tous les sujets et pour avoir un avis de qualité sur tous les sujets. Il est totalement vain et inutile de demander à tous les citoyens leur avis sur tous les sujets. Il faut se concentrer sur les sujets importants.
Par ailleurs, la démocratie ne fonctionne que grâce à l'intervention de professionnels.
Il y a d'abord, les professionnels des sujets évoqués. Dans un débat sur la fiscalité, il est judicieux d'écouter l'avis des fiscalistes. Ce ne sont pas les fiscalistes qui doivent décider des règles fiscales mais leur avis peut être utile (surtout le mien).
Il y a ensuite, les professionnels de l'information et du débat, les journalistes. Le job des journalistes est notamment d'interroger les experts, de comprendre les sujets et de les vulgariser pour que le plus grand nombre de citoyens puissent comprendre les points clés. Les journalises sont incompétents sur la plupart des sujets mais ils ont un talent décisif, ils savent se rendre compétent ponctuellement et transmettre leur compréhension des sujets au public.
Il y a enfin les leaders d'opinion. J'inclus dans cette catégorie non seulement les politiciens, mais tous ceux qui jouent un rôle dans le débat politique, donc également les intellectuels et les syndicalistes.
Les politiciens doivent écouter le peuple et déceler l'opinion du peuple pour la mettre en œuvre.
Mais le job des politiciens ne se limite pas à surfer sur l'opinion.
Les politiciens doivent faire l'opinion
Ils doivent s'impliquer personnellement pour définir quelle est la vérité sur un sujet et ils doivent agir pour convaincre le peuple pour que le peuple se rallie à cette opinion et la défende.
Les mauvais politiciens populistes ont une tendance naturelle à dire aux gens ce qu'ils ont envie d'entendre. Les politiciens courageux doivent faire prévaloir la vérité, quitte à ramer à contre-courant des opinions dominantes.
Mais les simples citoyens doivent aussi faire des efforts. Ils ne doivent pas contenter de donner leur avis et de voter. Ils doivent faire l'effort de s'intéresser aux sujets politiques importants pour se forger une option de qualité. Ils ne doivent pas aller au plus facile et retenir les idées qui leur plaisent le plus mais ils doivent faire l'effort de s'intéresser aux idées qui les gênent ou même qui s'opposent à leur convictions profondes. Personne n'a le monopole de la vérité et dans un débat politique il peut arriver que les idées des extrémistes soient au moins partiellement dans la vérité.
Le bon débat démocratique c'est celui qui précède une élection ou un référendum. Il faut une sanction au débat, un effet concret pour mobiliser les citoyens et les amener à prendre position.
L'idée du référendum citoyen est une très bonne idée des gilets jaunes.
M. MACRON aurait dû s'engager à faire un référendum avec 10 questions
Ces questions auraient été définies en fonction des réformes possibles et des choix stratégiques à effectuer.
Il aurait fallu faire un pré-débat pour définir les questions de telle sorte que le choix des questions soit à peu près validé par les experts, les juristes, les partis politiques et l'opinion publique.
Et ensuite il fallait lancer le débat populaire de 6 mois sanctionné par un grand référendum avec un vote par internet.
Il serait temps en effet que les élections puissent se faire par Internet, mais c'est un autre sujet.
M. MACRON a fait un débat qui révèle sa conception paternaliste de la démocratie, et accessoirement son goût excessif, et son talent incontestable, pour le one man show.
M. MACRON a certes rempli les salles.
Mais avec quel résultat ?