Les propriétaires de locaux d'habitation soumis à la taxe d'habitation doivent faire une déclaration spéciale chaque année, et pour la première fois avant le 1er juillet 2023 (art. 1418 du CGI). Cette déclaration doit se faire en principe par internet et il faut indiquer l'identité des occupants au 1er janvier.
Le texte de l'article 1418 du CGI prévoit :
"I.-Les propriétaires de locaux affectés à l'habitation sont tenus de déclarer à l'administration fiscale, avant le 1er juillet de chaque année, les informations relatives, s'ils s'en réservent la jouissance, à la nature de l'occupation de ces locaux ou, s'ils sont occupés par des tiers, à l'identité du ou des occupants desdits locaux, selon des modalités fixées par décret.
Sont dispensés de cette déclaration les propriétaires des locaux pour lesquels aucun changement dans les informations transmises n'est intervenu depuis la dernière déclaration.
II.-Cette déclaration est souscrite par voie électronique par les propriétaires dont la résidence principale est équipée d'un accès à internet.
Ceux de ces propriétaires qui indiquent à l'administration ne pas être en mesure de souscrire cette déclaration par voie électronique ainsi que les propriétaires dont la résidence principale n'est pas équipée d'un accès à internet utilisent les autres moyens mis à leur disposition par l'administration."
Les enjeux de cette déclaration
Cette déclaration doit permettre aux services fiscaux d'établir la taxe d'habitation pour tous les logements des contribuables leur servant de résidences secondaires puisque la résidence principale est désormais exonérée.
Elle permettra sans doute aux services fiscaux d'appliquer aussi plus facilement la taxe sur les logements vacants et de contrôler l'impôt sur la fortune immobilière.
Dans de nombreuses communes la taxe d'habitation sur les résidences secondaires est très élevée, notamment dans les zones touristiques. Les enjeux sont donc importants.
Modalités déclaratives
La déclaration doit être faite par internet.
Si vous êtes un particulier, il faut aller sur son espace personnel d'impôts.gouv. Il s'y trouve un onglet biens immobiliers avec une fiche qui décrit chaque bien immobilier que vous possédez.
Si la déclaration n'a jamais été faite par vous, il est mentionné par une pastille "n (nombre) déclarations attendues".
Dans ce cas, il faut aller vérifier la fiche du bien et, pour corriger directement, aller sur l'onglet "déclaration d'occupation" et si c'est OK on clique sur "aucun changement" et en cas de désaccord il faut aller sur "nouvelle déclaration" et il faut alors répondre à toutes les questions.
Les locaux professionnels sont juste mentionnés par une fiche mais vous ne pouvez pas faire une modification directement sur le site.
Si vous êtes propriétaire par une société, par exemple une SCI, vous devez faire la déclaration à partir d'un espace professionnel. Et si vous n'en n'avez pas, il faut en créer un en utilisant votre site personnel sur impots.gouv.fr. C'est une démarche qui peut prendre un peu de temps puisqu'il faut recevoir un code d'activation par la poste.
En théorie, pour ceux qui n'ont pas internet, il est possible de faire cette déclaration par un courrier mais à ce jour aucun formulaire n'existe. A mon avis, un simple courrier avec la désignation des locaux et le nom éventuel de l'occupant peut suffire. Ce type de déclaration papier peut paraître inutile si les informations figurent déjà dans une autre déclaration fiscale transmise aux services fiscaux, notamment la déclaration des revenus fonciers quand le bien est loué. Mais rien n'interdit selon moi de se servir d'une copie de la déclaration des revenus fonciers 2044 pour faire la déclaration des locaux
Le cas des meublés
Pour les meublés longue durée, il faudra indiquer quel était l'occupant au 1er janvier de l'année en cours.
Pour les biens exploités par une société, type SARL de famille, la taxe d'habitation n'est pas due par la société, en application de la loi.
Pour les meublés touristique, la déclaration prévoit qu'il est possible d'évoquer le fait qu'il n'y a pas d'usage personnel, mais à condition que le bien fasse l'objet d'un mandat à un agent immobilier précisant que le bien est affecté toute l'année à l'usage de location touristique, à l'exclusion d'un usage personnel.
Tous les propriétaires de locaux affectés à un usage de meublé touristique ont intérêt à choisir cette mention pour éviter la taxe d'habitation.
La taxe d’habitation n’est pas due en principe par le propriétaire pour un bien qui est destiné à la location saisonnière exclusive, c’est-à-dire qui est loué toute l’année à des clients, ou du moins qui est disponible à la location toute l’année.
Mais encore faut-il que le propriétaire puisse démontrer qu’au 1er janvier de l’année considérée, il n’avait pas l’intention d’utiliser le bien pour son usage personnel, même pour une très courte période durant l’année.
C’est au contribuable d’apporter la preuve qu’il n’avait pas cette intention au 1er janvier.
C’est une preuve particulièrement difficile à apporter car c’est une preuve négative et une preuve sur une absence d’intention.
Le Conseil d’Etat a rappelé ce principe, particulièrement contestable, dans un arrêt du 30 novembre 2007 repris par la doctrine administrative (CE 30-11-2007 n° 291252, 8e et 3e s.-s., Largitte : RJF 2/08 n° 164, concl. L. Olléon BDCF 2/08 n° 24 ; BOI-IF-TH-10-20-20 n° 40, 12-9-2012), reprenant son ancienne jurisprudence.
Selon le Conseil d'Etat, le propriétaire d'un local imposable qui peut être regardé, au 1er janvier de l'année d'imposition, comme entendant s'en réserver la disposition ou la jouissance une partie de l'année est redevable de la taxe d'habitation, même si, à cette date, le logement est loué de façon saisonnière.
Ainsi, un propriétaire qui a loué un logement meublé plusieurs mois pendant l'année d'imposition est redevable de la taxe d'habitation, dès lors qu'au 1er janvier il n'avait donné aucun mandat à une agence pour mettre l'appartement en location à l'issue du bail et pouvait donc être regardé comme entendant s'en réserver la disposition en dehors des périodes de location saisonnière.
Pour le Conseil d’Etat, il faut se placer au 1er janvier de l’année d’imposition et s’interroger pour savoir si le propriétaire avait l’intention de pouvoir utiliser le bien à un moment ou un autre de l’année civile à venir.
Et, de facto, le propriétaire est présumé avoir l’intention de se servir du bien à titre personnel. Il doit apporter la preuve contraire, même si cette preuve contraire peut résulter d’un simple document sous la forme d'un mandat.
Peu importe que, de fait, le propriétaire ne se serve jamais ensuite du bien dans l’année. Ce qui compte c’est la possibilité qu’il avait de s’en servir, ou plutôt les circonstances existant au 1er janvier et permettant de penser qu’il n’a pas exclu de s’en servir.
Puis-je éviter la taxe d’habitation en faisant valoir que je suis de toute façon dans l’impossibilité d’utiliser le bien à titre personnel, par exemple parce que je vis à l’étranger toute l’année ?
Non, car rien ne m’empêche de prêter le bien à un tiers et donc d’en avoir de facto l’usage, même si ce n’est pas à mon profit direct.
Pour le Conseil d’Etat, les faits postérieurs au 1er janvier sont sans importance, il faut se placer au 1er janvier et s’interroger pour savoir si le propriétaire peut apporter la preuve qu’il n’avait pas l’intention de conserver la disposition du bien, même quelques jours de l’année civile considérée.
Il ne s’agit pas d’imposer au propriétaire de louer toute l’année, mais il s’agit d’imposer au propriétaire de démontrer qu’il excluait de venir dans les locaux durant l’année , et ce en se plaçant exclusivement au 1er janvier.
Il n’est pas d’ailleurs interdit de prévoir selon moi des périodes de fermeture pour l’année à venir.
Peu importe également que le propriétaire soit déjà taxé à la CFE au titre de ce bien car il est tout à fait possible de cumuler la taxe d’habitation et la CFE pour le même bien.
Certes, une exonération de CFE est possible dans certains cas pour les résidences secondaires et les résidences principales mais cela suppose l’absence de délibération contraire de la collectivité locale concernée et, surtout, l’exonération ne porte que sur la CFE et pas sur la taxe d’habitation.
Donc les services fiscaux sont en droit d’appliquer la taxe d’habitation alors même que le contribuable est déjà assujetti à la CFE. S’il ne peut pas prouver qu’il n’a pas l’usage du bien, et qu’il se retrouve donc assujetti à la taxe d’habitation, il peut seulement alors demander le remboursement de la CFE payée à tort puisque le bien est à usage personnel et donc exonéré de la CFE , sauf délibération contraire de la collectivité locale.
Un bien dont le propriétaire a l’usage une partie de l’année est de facto assimilée à une résidence personnelle, c’est-à-dire soit une résidence principale, soit une résidence secondaire.
Dans les communes où il est possible d’éviter le cumul de la taxe d’habitation et de la CFE, il y a lieu de se demander si l’assujettissement à la taxe d’habitation ne pourrait pas être plus favorable que l’assujettissement à la CFE. L’idée serait alors d’accepter l’assujettissement à la taxe d’habitation, en reconnaissant la possibilité d’un usage personnel, pour éviter celui de la CFE.
Mais selon moi, le plus souvent, le coût de la taxe d’habitation est plus élevé que celui de la CFE, et de façon certaine dans les communes où il est prévu une taxe d’habitation majorée pour les résidences secondaires.
A ce jour, selon l'aministration, le seul argument que le propriétaire peut produire pour prouver qu’il n’avait pas l’intention d’utiliser le bien pendant l’année est un mandat conclu avec un agent immobilier, avant le 1er janvier de l'année considérée, et selon lequel le bien serait disponible toute l’année pour être mis en location saisonnière, en excluant l'usage personnel.
Cependant, selon moi, le fait de faire valoir l’existence d’un mandat excluant l'usage personnel n'est pas suffisant s’il présente une sincérité douteuse. L’administration fera une appréciation au cas par cas (Rép. Türk : Sén. 13-2-1997 p. 451 n° 18501).
En tout état de cause, si le mandat conclu avec l’agence prévoit une occupation possible durant l’année par le propriétaire, cela justifie l’assujettissement à la taxe d’habitation (CAA Bordeaux 20-5-1997 n° 95-960, 3e ch., Laffont : RJF 12/97 n° 1151).
Attention à bien garder un mandat à date certaine dans ses archives. Voir pour un cas où le contribuable se retrouve assujetti faute de produire des conventions sérieuses avec Gîtes de France pour toutes les années : TA Rennes 1-12-2021 n° 2100828 ; CE (na) 9e ch. 20-10-2022 n° 461014 : RJF 1/23 n° 35.
Cela dit, selon moi, le Conseil d’Etat n’a pas entendu imposer cet unique mode de preuve. S’il appartient au propriétaire de démontrer qu’il n’avait pas l’intention d’utiliser le bien à titre personnel au premier janvier de l’année, il peut en apporter la preuve par tout moyen.
D'ailleurs, autant le principe énoncé par le Conseil d’Etat paraît sévère, puisque le contribuable est présumé avoir l’intention de se garder l’usage du bien à un moment quelconque pour l’année civile à venir, autant le mode de preuve contraire admis par l'administration est finalement assez souple : il faut juste un mandat daté d’avant le 1er janvier de l’année et prévoyant une affectation exclusive à la location et excluant un usage personnel.
La question se pose de savoir quel autre mode de preuve pourrait être présenté par le propriétaire. En effet, de nombreux propriétaires ne font pas appel à un agent immobilier pour exploiter leur bien.
Peut-on se contenter de faire valoir que le bien est mis en location toute l’année sur une plateforme internet de location comme AIRBNB ou ABRITEL, notamment en faisant valoir que ces plateformes internet exercent de facto une activité d’agent immobilier ?
A mon avis non, sauf peut-être à présenter un document en ce sens. Il pourrait s’agir d’un courrier d’engagement de location annuelle envoyé à une telle plateforme mais à ma connaissance ce type d’engagement n’est pas prévu (voir cependant l'exemple Gîtes de France précité).
Il y a lieu de s'étonner de l'inaction des plateformes internet sur ce sujet pourtant important.
La simple présentation d’une copie d’écran du calendrier annuel proposant le bien à la location sans limitation ne paraît pas suffisant car la force probante d’un tel document est limitée.
Il faut produire un document officiel et significatif transmis à un tiers.
Il pourrait s’agir selon moi d’un courrier transmis à l’office de tourisme et indiquant la période de mise en location du bien pour toute l’année excluant expressément l’usage personnel, et, idéalement, doublé d’une attestation de l’office de tourisme reconnaissant que le propriétaire a ensuite respecté cette période, comme il le fait tous les ans, ou encore d’une publicité du bien dans la documentation publique de l’office de tourisme avec la mention de mise en location pour l’année entière. Cela peut se justifier plus facilement si l’office de tourisme est effectivement un apporteur d’affaire significatif.
Il pourrait s'agir peut-être aussi selon moi d'un contrat d'assurance excluant l'usage personnel.
Mais le mieux est encore le contrat d'agent immobilier.